La taille de structure
Les arbres avec trois branches sont parfois aussi beaux que des arbres avec 10-15 charpentières, c’est incroyable … Parfois même, ils ne sont formés que par une seule branche! Comment est-il possible d’avoir cet effet esthétique avec si peu de matière? Les choix esthétiques mènent à une réflexion sur la projection de nos arbres. Et ces projets impliquent donc des choix, des sélections.
Aujourd’hui, nous allons parler de la taille de structure.
1. Qu’est-ce que la taille de structure ?
On nous parle tout le temps de plusieurs types de tailles, en fonction des espèces, des périodes, de leurs buts. Mais concrètement, à quoi ça sert ? Quel sera le résultat du travail qu’on nous conseille de faire ?
Commençons par nous demander, c’est quoi une taille, on voit bien l’acte, mais le comprenons-nous bien ?
La taille, en général, consiste à supprimer une partie de tronc, de branche, de feuille, de racine au moyen d’un outil tranchant, aiguisé, propre, désinfecté si possible, sans attenter à la vie du sujet, ou partie du sujet que l’on veut traiter, et toujours dans le but d’obtenir une réaction, et donc un résultat.
Ensuite, quel est le but de la taille ? Ici nous devons préciser alors, quel est le but de la taille de structure? Et donc qu’est-ce que c’est en fait ?
La réponse est en partie dans le titre de l’article, un nom composé : “taille”, donc, grossièrement, on va couper des choses ; et “structure”, on va couper des choses structurelles, donc, tronc, et branches. Mais pas n’importe quelle branches, et pas uniquement les grosses branches. Une taille de structure vise à sélectionner les parties végétales qui servent, ou serviront, à ordonner, structurer, charpenter notre arbre, afin d’y asseoir la végétation, l’élan, l’esthétique, la taille (dimension), de notre arbre. Autrement dit, c’est le plus important, le plus mal compris ou interprété, et peut-être aussi un des sujets les plus craints, parce que impressionnants à faire ou voir les premières fois. Par exemple, tout le monde a peur de tailler “les grosses branches, elles ont mis tellement de temps à grossir …” oui, c’est long … mais non, il ne faut pas les laisser pousser sans les tailler ! Car sans la taille, comment créerez-vous les structures tertiaires dessus ? Comment créer une conicité requise sur une branche ?
Mais heureusement pour nous, quelques règles suffisent déjà à nous aiguiller sur ce que l’on veut supprimer ou insérer pour structurer notre arbre.
2. Quelles règles respecter ?
Règle n°1 : La règle des branches du bonsaï tu respecteras !
Observez bien le schéma ci-contre. Tout ce qui est “prohibé” comme implantation ou type de branche ne consiste pas à dire que c’est interdit, ou que ça empêche de faire un bonsaï… non ça consiste à dire “ces branches là sont moches!”

1. Gourmands : ひこばえ, やご : hikobae, yago
2. Rejets : 胴吹き枝 : doubuki eda
3. Branche qui croise d'autres branches : 絡み枝, 交差枝 : karami eda, kousa eda
4. Branches parallèles : かんぬき枝 : kannuki eda
5. Ramifications anarchiques : 込み枝 : komi eda
6. Branches qui revient vers le tronc : 逆さ枝 / 逆枝 : sakasa eda / gyaku eda
7. Branches sous une autre branche : ふところ枝 : futokoro eda
8. Branche malade ou morte : 病気の枝, 枯れ枝 : byouki no eda, kare eda
9. Branches parallèles : 平行枝 : heikou eda
10. Branche qui pousse vers le bas : 下がり枝 : shitagari eda
11. Branche qui pousse vers le haut : 立ち枝 : tachi eda
12. Branche qui croise le tronc : 幹切り枝 : kankiri eda
13. Branches qui pousses au même endroit (roue de charrue) : 車枝 : kuruma eda
Que ces branches là sont moches …en général !
Eh oui Jamie, y’avait un piège !

Pourquoi dis-je “en général” ? Parce que, comme nous le disons toujours sur la plateforme, les règles du bonsai sont des guides plus que des directives ! Il n’y a pas de prohibition mais de la direction. Je m’explique par un exemple, comme le dis notre ami Alexandre Escudero dans le cours Tout sur le pin noir sur une année (naturellement je vous le recommande si vous ne l’avez pas déjà visionné) “un bon exemple vaut mieux qu’on long discours !” Imaginez (oui, il faut bien que vous bossiez un peu …), vous avez un projet de shohin. Vous avez la possibilité de faire un han kengai. Basiquement, dans sa forme la plus pure et simple au monde : un tronc, une branche et une tête désaxée du collet. Tout bêtement, vous allez créer un arbre qui correspond à un style “contrôlé” par les “règles d’or” MAIS qui va vous faire dire “merde” à une autre règle … on a dit “pas de branches parallèles …on veut du quinconce !” Oui… bah non !
Autre exemple, plus facile pour ceux qui n’ont pas suivi au fond… vous voulez faire un han kengai mais vous adorez les racines aériennes … Du coup, vous le faites, et votre arbre est quoi ? Un han kengai ou un neagari ? Et bien tout simplement les deux …
Prenez des libertés et surtout du bon sens avec les “règles du bonsai”. Ce sont des lignes guides, tirées de mille ans d’expériences. Suivez-les autant que possible, mais restez logiques et cohérents. La santé de l’arbre, l'esthétique et la cohésion, voilà vos règles d’or !
Règle n°2 : Pas n’importe où tu couperas !
Evidemment, ça tombe sous le sens, mais, ne sommes-nous pas là pour apprendre ? Ouvrez alors vos livres page 394…(pour ceux qui ont la ref’).
Pourquoi ne pas couper n’importe où ? Sur les feuillus ça pousse partout ? Non… En tout cas pas sur tous ! Sur un jeune érable du Japon par exemple, les nouveaux bourgeons partiront d’un nœud … Sur un cognassier du Japon ça peut repartir d’une feuille ou d’une épine … Sur un pin alors là encore plus radical : pas de végétation = plus d’arbre, simple et efficace !
Observez bien votre arbre, posez vous les bonnes questions : ai-je un bourgeon, une branche, qui puisse prendre le relais avant de tailler ?
Alors, dans certains cas, dans les plus petits, les mame, par exemple, il n’est pas rare de voir un bonsaika acheter un arbre de 60 cm de haut et PAF ! Il le tronçonne à 3 cm du nebari pour en faire un moyogi sumo ! Demandez-lui alors comment il se sent… avec la plus belle humilité, il vous répondra qu’il a souillé la dignité qu’il lui restait, sinon… ne l’écoutez pas… Car on travaille avec du vivant, il peut mourir même si vous avez travaillé à la perfection, ça arrive.
Règle n°3 : Pas avec n’importe quoi tu tailleras !
Alors oui, une fois n’est pas coutume, je vais me répéter : DÉSINFECTEZ ET AFFÛTEZ VOS OUTILS !
On ne taille pas les structures avec n’importe quoi ! Vous voyez votre charpentier travailler ses tenons et mortaises avec des ciseaux cassés, pleins de colle et d’enduits, applaudissez-vous, ou priez-vous pour récupérer les arrhes versées ? Nous ne pouvez pas faire un travail efficace si vos outils ne le sont pas non plus.
Règle n°4 : Protection à ton martyr tu apporteras !
Mastic cicatrisant en pâte ou liquide, en tube, encre de Chine, on a pas mal de produits de protection pour assurer un bouchon / écorce synthétique provisoire à notre arbre en attendant qu’il produise un cale pour recouvrir la plaie. Parce que oui, vous allez l’amputer ! Coupez la jambe de votre ami.e et ne faites pas de pansement … pour l’arbre c’est pareil! Il faut lui faire un bandage sur le bobo, et quoi de mieux que ce qui a été créé spécialement pour ça? Alors en plus écolo, moins cher mais réservée aux plus petites plaies (donc plus pour les mame) y’a l’encre de Chine, souvent utilisée sur les fines ramifications fraîchement taillées du Zelkova Serrata.

Mais toutes les techniques et directives n’ont aucune valeur si vous ne respectez pas Dame Période.
3. Les bonnes périodes ?
On ne va pas tergiverser, y’en a deux principales. Une qui a fait ses preuves, et une plus bancale (qui est pourtant la plus mise en avant en France, étonnant non ?)
Le printemps est LA période, le rush, le top départ, le netplusultra, la SUPER PÉRIODE ! C’est le bon moment … et je vais vous dire pourquoi, sinon ce ne serait pas juste. Raison simple : vous avez préparé votre arbre à cette grosse étape (parce que oui, vous êtes consciencieux et que cette taille n’est pas anodine, repensez à l’amputation de votre ami.e… n’oubliez pas de panser si ce n’est toujours pas fait, arrêtez de lire et faites-le !). Donc, vous avez super-engraissé votre arbre tout l’automne (Equinoxe d’automne à solstice d’hiver) et tout l’hiver, parce que vous êtes comme nous, persuadé que l’arbre continue de consommer les nutriments dans le sol, même en mode “dodo”. Et là, on veut de la réaction, l’arbre dégueule d’énergie à revendre! Alors il débourre (youpi il n’est pas mort de l’hiver !) et PAF ! vous le taillez en mode cul-de-jatte ! Eh bien croyez-moi que la réaction va être au rendez-vous ! Parce qu’on sait que les plantes savent en avance ce dont elles vont avoir besoin pour pousser au printemps et font alors des réserves pour l’hiver et pour le printemps. Vous me suivez ? Si on accorde de l’importance aux dernières recherches sur la cognition végétale, si la plante a prévu des réserves pour 2 m³ de branches, mais que vous le réduisez à 0,2 m³, que va-t-il se passer ?
- Réponse A : l’arbre va en prêter à ses voisins, parce qu’il est généreux avec ses potes en pot.
- Réponse B : l’arbre va sortir 40 bourgeons par entaille en réaction.
- Réponse C : l’arbre va se bloquer et dépérir.
- Réponse D : la réponse D.
Et bien oui, la réponse B est la bonne !
Maintenant comparons avec l’automne. Vous n’avez pas sur-engraissé au printemps pour laisser l’arbre épuiser un peu ses réserves d’hiver, mais il réagira quand même, parce que l’automne est une période de pousse… MAIS tous les arbres ne réagissent pas de la même façon…certains ne poussent qu’une fois au printemps et… plus rien !!! Deuxièmement, si l’arbre ne pousse pas, pas de cale cicatriciel … eh oui … donc retrait de sève … BREF! L’automne c’est galère … et encore pire si vous n’avez pas de serre … l’équipe printemps vous souhaite la bienvenue !
4. Comment effectuer la taille de structure ?
On ne va pas faire un tuto, parce que ça n’existe pas pour toutes les espèces et variétés. Je vais donc vous dire comment savoir effectuer la taille de structure sur votre arbre particulier.
- Si la variété est traitée dans un cours sur faitesdubonsai.com par l’un de nos instructeurs, inscrivez-vous au cours, c’est incommensurablement le moyen le plus simple…
- Si la variété n’est pas traitée dans un cours sur faitesdubonsai.com par l’un de nos instructeurs, envoyez-nous un mail de suggestion, avec les formes, parce qu’on aime la politesse par chez nous.
- Vous manquez de patience et avez besoin de la réponse tout de suite : trouvez un interlocuteur qui travaille cette variété précise (pas qui le possède, qui le travaille vraiment!) et posez-lui la question, quitte à interroger une ou deux personnes de plus pour comparer les réponses si vous ne les connaissez pas.
- Internet, les livres. MAIS, vérifiez vos sources, ne prenez pas la première info pour argent content.
- Attendez un an de plus, qu’est-ce que ça coûte ? Assurez-vous seulement de ne pas avoir de risque d'inversion de conicité due à de mauvaises insertions de branches, taillez en vert, ça densifiera à tous les coups et ça freinera le grossissement des branches, tout ça le temps de récolter les bonnes infos.
- Vous êtes vraiment très impatient, vous mettez votre casque, vous lancez le dernier album de votre groupe japonais préféré (Ano, Kyary Pamyu Pamyu, Knosis, Atarashii Gakko, ou encore AIscream (sans communication commerciale)) et vaille que vaille… ok, amusez-vous, mais j’vous aurai au moins dit de faire vos recherches avant !
Voilà, maintenant il est temps pour moi de vous remercier une nouvelle fois de votre lecture, n’hésitez pas à nous poser des question, ou pas, à suivre la plateforme et ses instructeurs sur les réseaux, à aller voir leurs travaux, arbres, écoles, stages, mais n’oubliez jamais : Faites du Bonsaï !
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